Quelques mots de…
Chloé Moglia
écriture aérienne et courbe suspendue
— Comment Thierry Balasse vous a‑t-il présenté le projet Cosmos 1969 ?
Il m’a parlé du ciel, de la lune, et il m’a dit qu’Armstrong était une femme. À partir de là, c’était limpide…
— Vous êtes Neil Armstrong ?
Disons que j’incarne une image d’Armstrong sur ma ligne suspendue. C’est une affaire de gravité dans un autre espace-temps. Le son travaille et modifie l’espace, donc le chemin est à chaque fois différent. La scénographie repose également beaucoup sur la lumière, les textures, les matières projetées, aucune image figurative. Quelque chose de très mobile, comme un organisme vivant.
— Comment définiriez-vous ce que vous faites dans ce spectacle ?
J’ai été trapéziste mais je ne le suis plus : je ne voulais plus être une acrobate avec quelques figures, exclusivement concentrée sur ses gestes, ne regardant que ses pieds, ses mains, là où il faut les poser. Aujourd’hui, je me sens beaucoup plus gibbon que trapéziste ! Eux sont attentifs au monde qui les entoure, leurs mains se posent là où il le faut, sans y penser, l’effort ne les affecte pas. Là haut, suspendue, je regarde la scène, les musiciens, peut-être un peu comme Armstrong regardait la Terre. La claviériste navigue sur des stries de blanc et de noir, le batteur évolue dans un monde circulaire. Je ne crée rien, je suis présente, attentive, j’observe, je savoure et… ça crée !
— Comme une sorte de méditation ?
Oui. Les taoïstes disent que si l’on médite exclusivement dans la tranquillité, coupé du monde et des émotions, on devient stupide. Et si l’on est exclusivement dans la lucidité, on devient fou. La sagesse est entre les deux, et mon travail aussi. C’est comme être avec un serpent dans une pièce sans savoir exactement où il se trouve… Pas besoin de s’affoler, mais il faut rester vigilant, à l’écoute. Le serpent dans la pièce, c’est toute l’affaire de notre condition, et celle d’Armstrong.